De l'improvisation comme méthode de travail

Improviser ce n'est pas faire n'importe quoi.

Je n'ai pas d'imagination. C'est pour ça que je suis photographe et non pas peintre ou écrivain. Devant la page blanche je reste hébété, vide. Ce manque d'imagination ne me permet pas non plus de planifier une séance photographie avec un sketch book, une liste de poses que je souhaiterais. C'est peut-être un des points de départ de ma pratique.

Le deuxième fondement est un souhait, de ne pas coller à mes fantasmes, de rencontrer le modèle, de vivre une rencontre humaine. Ce souhait est souvent difficile à réaliser, bien souvent le modèle conçoit son rôle comme justement incarner le rêve du photographe, d'être avant tout une actrice. L'improvisation a comme ici de laisser la porte ouverte aux événements, de s'en saisir et de construire une histoire à deux, de laisser au modèle la possibilité de proposer des images, de suivre son idée.

Ces improvisations se basent souvent sur un thème. Souvent dans la première séance il s'agit avant tout de faire connaissance, de voir si un langage commun peut s'élaborer. Le lieu de la séance servira souvent de cadre à l'improvisation. Des séances ultérieures auront plus souvent un thème plus précis, un élément d'accroche, un objet, un vétement.

Le résultat est toujours un mélange étrange de déception et d'excitation. De déception car, même si j'ai du mal à imaginer précisément, j'ai toujours quelque rêverie qui se développe avant la séance, et cette rêverie n'est jamais réalisée. Excitation car précisément l'imprévu est une grande surprise, un résultat qui me dépasse, qui m'amène dans des endroits nouveaux. L'excitation de ne pas réaliser - une fois de plus - un auto-portrait sous la forme d'un modèle.