En guise de déclaration

Photographier l’autre, l’autre sexe, photographier la fascination devant son corps, sa chair, son sexe. Vivre cette expérience au plus près, au corps à corps et s’abîmer dans la contemplation

Ma pratique photographique s’articule sur la difficile contradiction entre une fascination devant l’autre et un désir obsessif et dévorant. La fascination sidère, empêche l’action, transforme l’autre en un absolument autre inatteignable pendant que le désir appelle au mouvement vers l’autre, au contact. Cette création vise à transformer une obsession maladive vécue comme une malédiction en objet esthétique positif qui permet d’accepter et de rendre acceptable cette perversion.

L’expérimentation de rencontres au plus près, peau contre peau, désir contre désir, brisant la limite instituée entre photographe et modèle est une tentative de vivre cette contemplation, de lui donner chair. L’absence de distance à la prise de vue amplifie l’urgence de la situation, il n’est pas possible de prendre du recul. Simultanément le temps se fige en stases successives, le petit clic répétitif de l’obturateur matérialise cette jouissance de l’oeil, le plaisir du désir enfin accepté et mis au jour. Les photos s’enchaînent sans préméditation en un flot continu de sensations érotiques et amoureuses.

Cette expérimentation s'incrit dans un malentendu primordial, le désir du photographe ne répond pas au désir du modèle, et vice versa. De manière générale, le modèle n'a pas de désir pour son photographe, son désir est ailleurs, mystérieux souvent, peut-être simplement la rétribution à la fin de la séance, parfois la conquète ou la reconquète de son image, parfois la mise en scène en personne désirable - pas forcément au sens sexuel du terme - et bien d'autres raisons. Le désir du photographe est sûrement plus simple, même s'il n'est que rarement le désir brutal de la possession sexuelle. Dans les deux cas, le désir est souvent indiscible, par trop de complexité chez les modèles, par trop de prudence chez les photographes.

L’étape finale est la mise en forme de cette matière brute et instinctive qui peut prendre deux voies pas forécment exclusives :

  • La forme la plus récente est de former de petites histoires courtes d'une trentaine d'images qui scénarisent la rencontre.
  • La forme la plus ancienne tente de conserver la nature, imparfaite, envahissante, répétitive, mais aussi troublante de beauté, où la sensualité de la caresse de la peau s’incarne dans la douceur du flou. Elle ne raconte pas vraiment d'autre histoire que la linéarité de l'expérience photographique vécue lors de la prise de vue.Chaque série présentée ne constitue pas une galerie de photos uniques à voir une par une, mais des objets photographiques consitués de multiples photos. Chaque photo n'a pas vraiment d'importance en elle même, seul compte l'image constituée de multiples photos. Ce n'est pas important de regarder chaque photo individuellement. La photo n'est pas le produit fini, c'est un matériau de base.

Les présentations sont conçue pour le médium d’exposition. Les mises en page web que je vous présente devront être réinterprétées pour d’autres supports.